Journal de bord:
Le self, le faux-self et le self héroïque:
Le self et le faux-self étant indissocialbles, nous les aborderons dans un même premier paragraphe. Nous nous pencherons ensuite sur une notion que nous avons découverte en faisant nos recherches sur le self et le faux-self: le Self héroïque de Riccardo Steiner.
Le self et le faux-self:
L'apparition du Self et du faux-self est étroitement liée aux différentes notions exposées et élaborées par Winnicott. Comme pour l'instauration d'un Moi unifié, l'instauration du Self et du faux-self dépend de la capacité de la mère à être suffisamment bonne. Le Holding, le handling et l'objetc-presenting sont donc fondamentaux dans cette étude.
Le holding désigne le soutien de la mère, soit les soins quotidiens adaptés aux besoins de l'enfant. Celui-ci permet l'intégration du Moi unifié.
Le handling désigne la manière dont la mère tient ou plutôt maintient l'enfant, dont elle le soigne, le traite et le manipule.
La mère « suffisamment bonne » protège son enfant des intrusions ou des manquements de l'environnement.
L'objetc-presenting est le fait que la mère propose à son enfant l'objet du besoin, alors même que celui-ci s'apprête à le créer pour satisfaire ses besoins.
Au début de la vie, le nourrisson a besoin que la mère s'adapte activement à ses besoins.Il doit vivre l'expérience de l'illusion ( « illusion que ce qu'il crée existe vraiment », Jeu et réalité, D.W. Winnicott) et l'omnipotence pour établir une relation avec les objets extérieurs. La mère, de par le contact physique et l'harmonisation empathique, permet le début de l'individuation. L'enfant éprouve la continuité de l'existence grâce à la continuité des soins de la mère. Ceci dit, cette adaptation et cette expérience de l'illusion ne doit pas perdurer: la mère doit de moins en moins faire sentir son adaptation afin que l'enfant puisse bénéficer de l'expérience de la frustration; celle-ci pouvant rendre les objets réels et donc haïs et aimés. L'enfant va alors progresivement abandonné la toute-puissance et reconnaît la réalité avec ce qu'elle « suppose de spontanéité et d'authenticité »: le vrai self.
Dans « Processus de maturation de l'enfant », Winnicott souligne: « le mot « self » apparaît quand l'enfant a commencé à se servir de l'entendement pour observer ce que les autres voient, éprouvent ou entendent, et ce qu'ils se représentent lorsqu'ils sont en présence de son petit corps ». Si nous reprenons les différentes tendances du développement du Moi, telles qu'elle sont conçues par Winnicott, nous pouvons nous apercevoir de l'intrication entre celui-ci, le holding/handling/object-presenting et la formation du Self:
La tendance principale est l'intégarion: du temps et de l'espace. Cette tendance correspondrait selon lui au holding. Ici s'établit un self unitaire. « La mère qui apporte une protection du moi suffisamment bonne ( quant aux angoisses inimaginables: se morceler, ne pas cesser de tomber, ne pas avoir de relation avec son sorps, ne pas avoir d'orientation) permet à l'être humain nouvellement créé d'édifier une personnalité sur me mode de la continuité de l'existence ». L'autre tendance est la personnalisation: le Moi se fonde sur un Moi corporel. Si tout se passe bien, le nourrisson commence à se rattacher au corps et aux fonctions de celui-ci. La peau est alors la membrane-frontière entre le Moi et le Non-Moi. Le Self est une unité qui est à la fois physiquement contenue à l'intérieur de la peau et psychologiquement intégrée.
Le vrai self, « au stade le plus primitif, est la position théorique d'où provient le geste spontané et l'idée personnelle. Le geste spontané est le vrai self en action. Seul le vrai self peut être créateur et peut être ressenti comme réel. » Si seul le vrai self est créateur, on peut supposer que celui-ci est en relation avec l'espace potentiel et les phénomènes transitionnels winnicottien. En effet, le vrai self est le seul à pouvoir faire l'expérience de l'espace potentiel et des phénomènes transitionnels qui sont le siège de la créativité. Le self permet aussi d'avoir accès à la symbolisation ( utilisation du symbole). Nous allons nous risquer à un autre postulat par rapport à ce qui vient juste d'être dit: le self n'est-il pas en rapport avec le Réel de Lacan? Le Réel de Lacan est le siège de la créativité, de la création: donc,nous pourrions tout à fait imaginer que le self est une partie du Réel lacanien, d'autant que « ...il y a un noyau de la personnalité qui correspond au vrai self. Ce noyau ne communique jamais avec le monde des objets perçus et l'individu sait qu'il ne doit pas entrer en communication avec lui ni qu'il doit être influencé par la réalité extérieur ». Tout comme le Réel lacanien, le self a quelque chose de l'indicible, de l' « inattrapable ».
Maintenant, nous allons voir ce qu'il se passe lorsque les conditions ne sont pas favorables. C'est à dire lorsque la mère, l'environnement ne sont pas suffisamment bons. Mais ne nous y trompons pas: avoir un faux self ne relève pas systématiquement de la pathologie comme nous le verrrons. Si la mère ne répond pas de façon adéquate au besoin de l'enfant , l'enfant peut s'y adapter jusqu'à un certain point en comblant le manque par l'hallucination. Mais ce mécanisme finit par échouer et l'enfant perd contact avec ses besoins, devient victime d'intrusions et incapable d'usage symbolique. C'est à ce moment qu'il va développer un faux-self afin de protèger son vrai self de la désintégration, de l'anéantissement. Le faux-self est donc un système de défense: il dissimule et protège le vrai self. Winnicott compte plusieurs gradations qui vont « jusqu'à une pathologie de type schizoïde où le faus-self est instauré comme étant la seule réalité venant ainsi signifié l'absence de vrai self ». Voici les 5 garations soulignées par Winnicott:
« 1- A l'extrême, le faux self est établi comme réel et c'est lui que les onservateurs ont tendance à prendre pour la personnalité réelle. Cependant dans les relations de la vie quotidienne, celle du travail et des amitiés, le faux self commence à faire défaut. Ici le vrai self est dissimulé.
2- Le faux self défens le self authentique. Le vrai self est toutefois perçu comme virtuel et une vie secrète lui est permise. C'est l'exemple le plus clair d'une maladie clinique organisée dans un but positif: la préservation de l'individu en dépit des conditions anormales de l'environnment.
3- Le faux self a pour but principal la quête des conditions qui donnent au vrai self la possibilté de recouvrer son bien. Si ces conditions ne peuvent être trouvées, alors il faut que se réorgansie une nouvelle défense contre l'exploitation du vrai self. Que le doute intervienne et le résultat clinique est le suicide. Dans ce contexte, le suicide est la destruction du self total pour éviter l'anéantissement du vrai self.
4- Le faux self s'établit sur la base d'identifications.
5- Dans l'état de santé: le faux self est représenté par toute l'organisation que constitue l'attitude sociale polie, de bonnes manières et une certaine réserve. Une grande partie du faux self est passée dans l'aptitude individuelle à renoncer à l'omnipotence et aux processus primaire en général, avec pour bénéfice la place dans la société que le vrai self ne peut jamais atteindre et maintenir seul. »
Avec cette dernière assertion, nous pouvons voir que dans chaque self total se trouve le vrai self et le faux self; ce dernier nous permettant d'avoir notre place dans la société et d' y être intégré.
Après lecture de ces différentes gradations du faux-self, nous ne pouvons ne pas faire le parallèle avec la seconde peau d' Esther Bick. Pour elle, lorsque les conditions sont défavorables, il peut y avoir formation d'une seconde peau, « une prothèse substitutive, ersatz musculaire qui remplace la dépendance nromale vis-à-vis de l'objet contenant par une pseudo-indépendance. » Mais plus encore, c'est sa conception de l'état « sac de pommes » qui nous interpelle et fait un écho à la conception du faux self: « il s'agit des fruits dont la peau est fine et fragile et qui symbolisent couramment le sein: ce sac figure l'intérieur de Soi tel que le protège et le cache la seonde peau; celle-ci contient les parties psychiques meutries, séquelles d'une période archaïque de troubles du nourrissage; dans cet état, le patient est susceptible, inquiet, réclamant attention et éloges, redoutant catastrophe et effondrement »).
Le sujet qui développe un faux-self , ou une personnalité d'emprunt, est empli de l'impression d'inutilité,de vide et de néant et d'inutilité de la vie. Ce qui nous amène à penser que le développement du faux self provient d'une rupture de la continuité de la vie ( going on being); ce qui peut amener le sujet jusqu'au repli autistique; ce qui peut faire penser à l'élaboration d'un Moi-peau carapace tel que le conçoit Didier Anzieu.
Le sujet ayant une personnalité en faux self ne crée pas, il imite et se soumet à l'environnement. Nous ne connaissons pas les personnalités en faux self, mais nous pouvons supposer qu'en atelier d'art-thérapie nous serions face à un patient se soumettant à nos demandes sans pour autant ressentir la création ni l'habiter. De plus, si nous nous référons à ce qui vient dêtre dit, une personnalité en faux self n'accède pas à la symbolisation. Or nous tentons de permettre à nos patients de s'expimer symboliquement par un média tel que les arts plastiques par exemple. La création faisant figure d'objet transitionnel, objet par qui la symbolisation et l'imagination et le jeu peuvent entrer en action, nous pouvons penser que l'art-thérapie peut aider ces personnalités à inflêchir leur faux self et d'accèder à un faux self de compromis avec l'environnement et non de faux self cachant le vrai self. Car comme le souligne Winnicott, « il ne saurait vraisembablement y avoir destruction complète de la capacité de l'individu à vivre une vie créative; même en cas de soumission extrême et d'établissement d'une fausse personnalité, il existe, cachée quelque part, une vie sécrète qui est satisfaisante parce que créative ou propre à l'être humain. Ce qu'elle a d'insatisfaisant est dû au fait qu'elle est cahcée et par conséquent, qu'elle ne s'enrichit pas contact de l'esxpérience de la vie. » En discutant avec quelques professionnels, nous nous sommes rendu compte à quel point il est difficile de détecter une personnalité en faux self et que travailler avec ce type de personnalité est très difficile. C'est probablement pour cela que Winnicott déconseillait à des psychanalystes débutants de s'occuper de tels patients.
Nous allons maintenant aborder la notion de self héroïque, élaborée par Riccardo Steiner.
Le self héroïque:
Il serait une des nombreuses formes sous lesquelles se manifeste le Moi Idéal. Il fait partie du patrimoine de la personnalité créative. Donc nous pouvons avancé que le self héroïque est une partie du Self, puisque, comme nous l'avons vu, le self est la partie créative de notre personnalité. Il s'agit en fait d'un système d'identifications projectives et introjectives avec des personnages héroïques. Par personnages héroïques, Riccardo Steiner entendaient les artistes, les personnalités politiques, les écrivains voire les sportifs. Nous pouvons supposer que ce Self héroïque trouve son fondement dans l'aire potentielle de jeu, dans l'aire culturelle de Winnicott et commence avec les objets transitionnels winnicottiens. Riccardo Steiner souligne l'importance de la stimulation de l'environnement pour que puisse s'ériger le self héroïque: « si le self héroïque a été convenablement nourri par la famille ou le milieu éducatif, le créateur commencera à éprouver, le moment venu, le besoin spécifique d'identifier certaines parties de son personnage à des héros de sa tradition culturelle ou d'autres ( entendaons par là d'autres traditions culturelles). » Dans « Jeu et réalité », Winnicott soulevait aussi ce point important: « ...mais si cette chance ne lui est pas donnée, il n'est pas d'aire dans laquelle le bébé pourrait avoir un jeu ou une expérience culturelle. Il s'ensuit alors qu'il n'y a pas de lien avec l'héritage culturel et qu'il n'y aura pas de contribution au lot culturel ». On peut alors facilement comprendre toute la souffrance éprouvée par les personnalités en faux self qui ressentent la vie comme inutile;on peut supposer qu'une personnalité en faux self, n'ayant plsu ou peu de lien avec l'héritage culturel, ne puisse développer un self héroïque suffisament ancré dans sa vie. En effet, le self héroïque est un aspect important du processus de création du fait de l'interaction constante du créateur avec la tradition qu'il s'est choisie ou avec ses pairs. Le self héroïque renvoie au besoin spécifique d'un créateur de se mesurer aux héros de sa tradition culturelle ou d'autres voire de les surpasser. Riccardo Steiner souligne que « du fait d'évènements qui ont marqué le développement infantile et adolescent, le self héroïque et ses identifications projectives et introjectives peuvent être perturbés voire cesser d'exister. Cela peut se solder par une distorsion mégalomaniaque du self héroïque qui en vient à se croire narcisssiquement et de façon destructive au dessus de toute frome de dépendance à l'égard de ses pairs ou de quelque tradition que ce soit. Les troubles peuvent aussi se manifester sous la forme d'une apathie paralysante et mélancolique qui met, alors, l'individu dans l'impossibilité d'établir un rapport constructif avec ses pairs, en un mot qui le rend incapable d'apprendre d'eux quoi que ce soit ». Le parallèle avec le problème du faux self est, d'après nous assez clair, puisqu'une personnalité en faux self peut apprendre des choses mais ne les habite pas, ne les vit pas. On peut aussi imaginer qu'une personnalité en faux self ne va pas se mesurer ou tenter de surpasser les héros de sa tradition culturelle ou de celle qu'il s'est choisie, surtout si l'on considère qu'elle vit dans la soumission et l'imitation. En art-thérapie, nous pouvons peut être aider ces patients à retrouver un lien avec l'héritage culturelle et les amener petit à petit non plus à imiter mais à se « frotter » à ses héros en laissant sa propre créativité s'exprimer.
Nous n'avons pas trouvé beaucoup de document sur le self héroïque et nous avons donc surtout travaillé ce concept à la lumière des concepts de self et de faux self élaborés par Winnicott. Comme nous l'avons dit plus haut il est difficile de « détecter » une personnalité en faux self, d'autant plus que d'après les personnes que j'ai interrogées, on peut aussi « voir » un faux self là où il n'y en a pas. Par contre, il nous semble que l'art-thérapie de par l'utilisation d'un objet tiers ( l'oeuvre d'art) peut aider un personne ayant un faux self fort à inflêchir celui-ci, à redevenir créatif en opérant une régression et aussi à recréer des leins avec sa tradition culturelle ou avec celle qu'il aura choisie.
Stéphanie Carvalho
4ème année, cursus par correspondance.
« Jeu et réalité », D. W. Winnicott.
« Processus de maturation chez l'enfant », D.W. Winnicott.
« Le Moi-Peau », Didier Anzieu.
« Les écrits de Martha Harris et d'Esther Bick »; sous la direction de Meg Harris Williams.
« Les enveloppes psychiques », Didier Anzieu.